Vous avez bien lu: cette berline Toyota Yaris 2016 (qui porte le badge Scion iA aux États-Unis - lisez ici que la philosophie prix et équipements est toute autre chez nos ami-ricains) est en vérité une berline Mazda2, fabriquée à Salamanca au Mexique, dans l'usine de Mazda pour laquelle Toyota a (quand même) contribué à hauteur de 100$ millions.

La collaboration entre les deux constructeurs japonais est possible en vertu d'une entente qui remonte à trois ans déjà et nous sommes donc ici en présence du premier fruit de pareille coopération.

Ce fruit à quatre portes ne nous parvient que sous le badge Toyota; Mazda n'a pas l'intention de vendre une berline Mazda2 en sol canadien. La seule Mazda2 de nouvelle génération qui nous sera proposée quelque part l'an prochain continuera d'être à hayon. Et celle-là ne se retrouvera pas chez Toyota, qui poursuit avec sa propre Yaris à trois ou à cinq portes, assemblée... à Valenciennes, en France.

Un dernier détail: à partir de 16 995$, la berline Yaris 2016 n'est plus le modèle d'entrée de la famille Toyota. Bien au contraire: elle demande jusqu'à 15% plus cher que sa contrepartie hatchback, voire un millier de dollars de plus que le prix de base de la (pourtant plus grande) Toyota Corolla.

Ridicule, dites-vous? Peut-être, mais la nouvelle Toyota Yaris 2016, dans sa configuration berline, représente quand même l'une des meilleures propositions automobiles de l'heure. Sauf que... voyez plus bas jusqu'à quel point Toyota Canada ne veut pas vous la vendre.

Des voitures qui partagent les gènes de deux constructeurs automobiles concurrents, ça s'est déjà vu. Et ça se voit même plus souvent qu'ailleurs au sein du groupe Toyota; on n'a qu'à penser aux actuelles Scion FR-S/Subaru BRZ, aux futures sportives Toyota Supra /BMW Z4, voire aux défuntes jumelles (non identiques) Pontiac Vibe et Toyota Matrix.

Mais là où ces deux derniers modèles exploitaient bien leurs différences, la berline Toyota Yaris 2016... ne se donne même pas cette peine. Mises à part la calandre à l'hexagonal très affirmé de Toyota et l'esthétique torturé des feux arrière repris à la Corolla, tout le reste est signé Mazda.

C'est d'abord flagrant dans cette silhouette toute en fluidité, élégamment rehaussée d'ailes musclées. Et c'est fragrant jusque sous le capot, où l'on compte au minimum six étiquettes Mazda.

Mais c'est surtout flagrant dans l'habitacle où, exception faite du logo Toyota sous les yeux du conducteur, tout respire le constructeur d'Hiroshima - des contrôles au design des sièges, jusqu'à la télécommande de déverrouillage.

On pourrait pousser les hauts cris, mais le fait est que la nouvelle berline Toyota Yaris possède un cachet de sophistication dont ne bénéficiait pas l'ancienne génération (disparue, rappelons-le, avec l'année/modèle 2012).

Les matériaux sont souples et de grande qualité, le style est élégant et sportif, l'assemblage est d'excellente facture - trois aspects non attendus de la part d'une petite économique.

On aime particulièrement les empiècements faits de simili-composite qui rehaussent la cabine ici et là, on apprécie la simplicité des contrôles qui ne prêtent pas flanc à la distraction. Un seul bémol: l'insonorisation, à vitesse d'autoroute, laisse beaucoup trop passer les bruits éoliens au pare-brise et ceux de la route sous châssis.

Côté dimensions, la berline Yaris a l'avantage d'un empattement plus généreux que sa comparse française à hayon, ce qui se traduit par un dégagement plus charitable (près de trois centimètres en sus) aux jambes arrière.

Certes, la silhouette plus basse retranche sur la hauteur sous-plafond, mais le dégagement aux têtes demeure aussi magnanime que pour la Toyota Corolla et ce, à toutes les places.

Si l'on se fie aux calculs du constructeur, le coffre de la berline sous-compacte (382 litres) se fait 14 litres plus vaste que celui de la compacte. Voilà une très bonne nouvelle pour la petite, au détriment de la (supposée) plus grande soeur...

La berline Toyota Yaris 2016 offre le groupe électrique, les commandes audio au volant, les rétroviseurs chauffants, la connectivité Bluetooth, la climatisation, le régulateur de vitesse et même le démarrage par bouton-pressoir - de série, s'il vous plaît.

Voilà qui est tout à fait inattendu chez les sous-compactes, même chez celles de fabrication coréenne, pourtant réputées les plus complaisantes en termes de rapport qualité/prix.

Très bien nantie en variante de base, la berline Yaris s'amène cependant avec un bizarre d'écran tout mince installé au sommet de la planche de bord et dont les commandes sont non seulement inaccessibles, mais aussi tout à fait inutiles, puisque dupliquées au volant.

C'est pourquoi nous recommandons le (seul) groupe d'options Amélioré, même s'il n'est disponible qu'avec la boîte automatique. S'ajoute alors des gâteries comme les sièges chauffants, les jantes d'aluminium, les phares antibrouillard et, surtout, un véritable écran de 7 pouces, avec sa caméra de recul et sa molette de contrôle.

Cette dernière, peut-être l'élément le plus «Mazda» de toute la voiture, est adéquatement positionnée entre les deux sièges avant et livre de façon instinctive à peu près toutes les fonctions de bord.

Pour cette berline Toyota Yaris de groupe Améliorée, il faut toutefois allonger 20 200$. Ça paraît beaucoup, si l'on magazine pour un mini prix, mais comme nous le verrons plus bas, pareille étiquette n'a absolument pas à rougir de l'équipement proposé.

Tenue de route affirmée, direction des plus précises, suspension ferme mais qui ne souffre pas des sautillements inhérents à la poutre de torsion, freinage presque trop convaincant... Qui aurait pensé déclamer pareils attributs pour une sous-compacte - qui plus est, chez Toyota?

Et pourtant: en laissant à Mazda toute liberté de conception, Toyota récolte une berline Yaris au comportement le plus dynamique de la catégorie.

Certes, le quatre cylindres (encore de 1,5 litre, mais désormais à injection directe) ne développe toujours que 103 chevaux et 106 lb-pi de couple. Il est toutefois avantagé par le poids-plume de la voiture (sous les 1100kg), merci aux percées SkyActiv de Mazda.

De même, les archaïques boîtes manuelle à cinq vitesses et automatique à quatre rapports, qui dotent toujours la comparse Yaris à hayon, sont remplacées par de modernes transmissions à six rapports. La manuelle profite d'un court levier agréable à manier, pendant que celle automatique se transige en toute transparence, ajoutant la commande sport pour des réactions plus franches. (Remarquez, ce mode est bien inutile, au vu de la petite puissance.)

Manuelle, automatique... laquelle choisir? Difficile de trancher, puisque les deux boîtes accompagnent fort bien la motorisation. Celle automatique a le mérite d'être plus économique en carburant - elle parvient même, avec sa cote combinée officielle de 6,4L/100km, à consommer un litre de moins aux 100/km versus la Yaris à hayon.

Notre essai (boîte automatique) dans la belle campagne entourant la ville de Québec nous a permis d'enregistrer aussi bas que du 5,4L/100km. Après ça, qui a besoin d'une hybride...

La nouvelle Toyota Yaris berline est, pour ceux qui se magasinent une petite voiture bien nantie, la plus intéressante sous-compacte de l'heure, tant pour son allure que sa conduite, pour la qualité de son habitacle que son niveau d'équipement. Avec son groupe électrique, sa climatisation et son régulateur de vitesse de série; sa motorisation frugale et bien déliée; ainsi que sa plateforme moderne - et sécuritaire, vient de décréter l'américaine Insurance Institute for Highway Safety, la variante berline n'a aucune difficulté à justifier son étiquette de base de 16 995$. Même si c'est là 980$ plus cher que pour la Yaris hatchback à cinq portes, voire presque 2500$ de plus que pour celle à trois portes.

La (plus grande) Toyota Corolla débute à 15 995$? Dites-vous qu'il faut grimper pas mal plus haut dans l'échelle des versions de cette compacte pour obtenir autant que n'offre, de série, la berline Yaris.

Là où la justification est toutefois plus difficile, c'est sur le plan du financement. Car celle qui débarque tout juste chez les concessionnaires canadiens s'affiche à des taux fort peu intéressants - entre 2,5% et 3,5%. Du coup, les mensualités se font plus élevées (d'au moins une quarantaine de dollars, pour un achat sur 60 mois) versus une Toyota Yaris à hayon d'équipement similaire...

... voire que pour une Toyota Corolla (modèle de base).

Si vous êtes un habitué de la conduite connectée et directe des Mazda, vous aimerez retrouver les mêmes bons ingrédients dans un plus petit pot - que le petit pot en question s'appelle Mazda2 ou Toyota Yaris. Mais si vous êtes un client de longue date de Toyota, vous trouverez que la suspension vous brasse le camarade, que la direction est définitivement très... directive et que, dans l'ensemble, l'émotion du pilotage a supplanté la rationalité du confort.

Et si vous êtes un fervent de l'indéfectible fiabilité des produits Toyota, vous devrez par ailleurs vous rappeler qu'outre deux ou trois logos Toyota, tout le reste de la berline Yaris est le propre de Mazda.

Et malheureusement, même les plus récents sondages de qualité initiale et à long terme, notamment ceux de la très respectée J.D. Power, placent Mazda sous la moyenne de l'industrie.

Évidemment, les bonzes de Toyota Canada assurent « que la voiture respecte nos hauts standards de qualité et de sécurité», «qu'elle a passé tous nos tests» et disent s'attendre «à ce qu'elle soit aussi durable que la Toyota Yaris à hayon.» Mais dans les coulisses, ils s'arrangent pour ne pas (trop) en vendre, de berline Toyota Yaris. Dommage.