JDM: À vos risques et périls...

Trucs et astuces
samedi, 3 novembre 2007
Des importateurs sans licence, des dépôts exorbitants, pas de garantie mécanique… L’Office pour la protection du consommateur découvre peu à peu des pratiques frauduleuses dans le secteur de la vente de «JDM» - les «Japanese Domestic Market».

Au Québec, tout vendeur de véhicules d’occasion doit détenir une licence de la SAAQ et contracter un cautionnement de 100 000$. Pourtant, la plupart des entreprises québécoises qui s’affichent sur Internet comme étant des importateurs de « JDM » ne détiennent pas ladite licence, confirme la SAAQ.

Les importateurs que nous avons interrogés ont admis ne pas la posséder ou ont dit être sur le point de l’obtenir. La SAAQ réplique qu’aucune demande produite par ces importateurs n’est en suspens.

Les transactions de « JDM » s’effectuent donc de « particulier à particulier » ou sous la licence et le cautionnement d’un autre marchand. « C’est illégal, c’est de la fraude, » martèle Jean-François Cavanagh, conseiller juridique à l’Association des marchands de véhicules d’occasion du Québec (AMVOQ).

De surcroît, plusieurs de ces entreprises sont fichées à l’Office pour la protection du consommateur (OPC) : « Nous avons reçu quelques plaintes pour des réparations automobiles, principalement des moteurs, » rapporte Réal Coallier, relationniste à l’OPC.

Ce dernier fait d’ailleurs remarquer que la plupart des vendeurs de « JDM » invoquent autre chose que l’importation comme raison d’affaires, notamment la «consultation en importation» et la «gestion».

« JDM » quand même?

Afin de limiter les dangers d’une transaction « JDM », l’OPC recommande de magasiner son véhicule parmi ceux qui se trouvent déjà en sol canadien, plutôt que de le faire venir du Japon. «Vous aurez l’avantage de pouvoir le voir et le faire inspecter,» dit M. Coallier.

Aussi, attention au dépôt : certains compagnies exigent jusqu’à 70% de la somme totale. Ces dépôts élevés font d’ailleurs l’objet de plusieurs demandes d’information récemment reçues sur les « JDM » par l’OPC.

« Si l’on exige un dépôt, donnez le plus petit montant possible, exhorte M. Coallier. N’oubliez pas: si vous faites affaires avec un importateur sans licence, vous risquez de faire une belle donation… sans reçu d’impôt. »

À ces importateurs qui travaillent sous la licence d’un autre marchand et qui affirment dur comme fer ne pas offrir de garantie, l’OPC rappelle qu’ils demeurent liés par la Loi sur la protection du consommateur. Celle-ci dit qu’un bien « qui fait l’objet d’un contrat doit être tel qu’il puisse servir à un usage normal pendant une durée raisonnable ». Les vendeurs de « JDM » ne peuvent se soustraire à cette loi.

Par contre, ceux qui agissent comme des « particuliers » ne sont pas liés par cette clause – le consommateur n’a alors aucun recours si les choses tournent mal, à moins de réussir à prouver, auprès des tribunaux, que le « particulier » n’en est pas un.


S’assurer… avant

Alexandre Crépault est le (jeune) rédacteur en chef du magazine Québec Tuning. Il est aussi le propriétaire d’une Nissan Skyline GTR 1989, qu’il a fait venir du Japon au printemps dernier. Pour ce bolide vieux de 17 ans, il a payé 15 000$. Une inspection complète a par la suite révélé quelques bobos mécaniques. « Comme les pièces ne se retrouvent pas chez Canadian Tire, il a fallu que je les commande du Japon. »

Cinq jours et 2000$ plus tard, sa Skyline était fin prête. Encore lui a-t-il fallu dénicher des assurances : « Personne ne voulait m’assurer! J’ai finalement trouvé, mais un de mes amis, qui cherche toujours, est si désespéré qu’il pense revendre sa voiture. »

Au Québec, tout automobiliste doit assurer son véhicule au minimum pour 50 000$ en responsabilité civile. Mais comme les pièces pour une « JDM » ne sont pas toujours disponibles et que ces véhicules ne figurent généralement pas au fichier des risques de réclamation des assureurs, ces derniers se montrent frileux.

Alexandre Royer, du Bureau des assurances du Canada (BAC), recommande de magasiner son assurance avant d’acheter une « JDM ». « Voyez si on accepte de vous assurer et, si oui, à quel prix. Une « JDM » à 10 000$ peut sembler une aubaine, mais ce l’est moins si on vous demande une somme exorbitante pour ne l’assurer qu’en responsabilité civile et que vous demeuriez responsable de « vos » dommages, en cas d’accident… »


Deux fois moins de kilométrage

Malgré ces embûches, les « JDM » sont suffisamment en demande pour qu’au dernier Salon Sport, Compact et Performance, au Stade olympique en octobre, elles ont représenté une voiture exhibée sur dix, soutient Ben Woo, organisateur de l’événement.

Certains ne craignent pas d’investir plusieurs milliers de dollars dans une voiture d’outre-mer qui a déjà 15 ans. « Il faut savoir que les voitures roulent peu au Japon et qu’elles sont bien entretenues, » dit Franz Korzer, de Keizen Auto, une entreprise qui soutient avoir importé une cinquantaine de véhicules depuis deux ans. L’homme d’affaires dit avoir vendu cinq « JDM » au dernier Salon.

Vrai que les Japonais roulent deux moins que les Canadiens – en moyenne 10 000 kilomètres par année, soutient Yuji Nomoto, du bureau torontois de l’Organisation nationale du Tourisme du Japon. Qui plus est, de sévères inspections aux deux ans forcent les conducteurs nippons à bien entretenir leur automobile. Voilà qui signifie des véhicules usagés bien conservés, avec peu de kilométrage au compteur.

Un kilométrage dont l’exactitude est cependant difficile à vérifier, de ce côté-ci du Pacifique : « Il n’y a pas de procédé légal, pas de technique existante pour certifier que le compteur n’a pas été reculé, dit Jean-François Cavanagh, de l’AMVOQ. Il est sans doute possible de recourir à un organisme comme CarFax, qui détient l’historique des voitures qui roulent là-bas, mais… parlez-vous japonais? »


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