Hyper-kilométriques: N'essayez surtout pas ça...

Vous connaissez l’hyper-kilométrage ou, en anglais, l'hyper-mileage? Cette technique a commencé à germer après les événements du 11 septembre lorsqu’un certain Wayne Gerdes, de Chicago, a décidé qu’il en avait assez, de la dépendance américaine au pétrole. Il a donc publié sur Internet une série de pratiques réductrices de consommation en carburant.

Le problème: si, pour une voiture conventionnelle, ces mesures permettent des économies presqu’à la hauteur des voitures hybrides, toutes ne sont pas sécuritaires.

Loin de là.

Même que l’Association américaine des automobilistes (AAA) a émis une mise en garde à cet effet – et CAA-Québec abonde dans le même sens.

Alors, de grâce, n’essayez pas ce qui suit…

Sur la ligne

Première technique d'hyper-kilométrage controversée: le « ridge-riding », qui consiste à faire rouler les roues de droite de son véhicule sur la ligne de démarcation routière.

Il est dit qu’en circulant sur de la peinture lisse plutôt que sur du bitume rêche, les pneumatiques rencontrent moins de friction, ce qui contribue à une légère réduction de la consommation.

Mais garder la moitié de ses pneus sur une mince bande de signalisation exige de la concentration. Qui plus est, ça nuit à la circulation – comment réagiriez-vous, comme automobiliste, si celui devant se promenait décalé, presque dans l’accotement?

Pire: celui qui pratique le « ridge-riding » pourrait voir sa tentative de sauver de l’essence virer à la catastrophe si un véhicule en panne était justement à l’arrêt, dans cet accotement.

Le « drafting »: illégal

Le « drafting », qui tire son inspiration de la course automobile, fait en sorte qu’un véhicule profite de l’aspiration de celui qui le précède.

L’effet est encore plus grand si le véhicule devant est un mastodonte de poids lourd: la résistance à l’air est alors presque nulle pour celui qui suit dans l’arrière-train.

Mais pour « drafter » avec efficacité, il faut suivre de près – de trop près. Au lieu d’une conduite préventive (vous connaissez la règle: deux secondes d’intervalle avec le véhicule devant), l’automobiliste qui « drafte » roule en mode défensif et ne peut donc anticiper les mouvements de la circulation.

Il croit qu’il sera en mesure de s’immobiliser à temps si le poids lourd devait subitement freiner devant? Des petites nouvelles pour lui: si ce camion est délesté de tout chargement, il freinera beaucoup plus rapidement que n’importe quel véhicule de tourisme. Et en moins de temps qu’il n’en faut pour crier « hyper-kilométrage », celui qui voulait épargner quelques sous en carburant emboutira l’arrière du mastodonte.

Ça lui coûtera davantage en toile froissée et ça pourrait lui coûter pas mal cher en contravention, s’il se fait pincer: au Québec, l’action de suivre de trop près est interdite par l’article 335 du Code de la sécurité routière.

Amende: entre 100$ et 200$, plus deux points d’inaptitude.

Le « coasting »: aussi dangereux qu’inutile

Pour les « hyper-kilométriques », un moteur qui tourne est synonyme de consommation – cette même consommation qu’ils veulent réduire à tout prix. Voilà pourquoi certains vont jusqu’à éteindre leur moteur à l’approche d’une pente descendante.

Erreur.

Cette technique, les experts de la sécurité routière la déconseillent fortement.

Car qui dit moteur arrêté, dit interruption de l’assistance aux freins et à la direction. Autrement dit, plus de contrôle du véhicule.

Cette pratique (ou encore celle de rouler avec la transmission au neutre) est d’autant dangereuse qu’elle est inutile. En effet, les véhicules d’aujourd’hui sont conçus pour ne pas brûler une goutte d’essence en compression. CAA-Québec a fait le test avec un appareil branché à un véhicule-cobaye et a ainsi prouvé qu’en descente, si on relâche simplement l’accélérateur, c’est zéro consommation.

Et ce, tant pour les véhicules à transmission automatique que manuelle.

Ne plus pouvoir raconter ses exploits…

Il y a des « hyper-kilométriques » qui s’ambitionnent au point de ne plus jamais toucher à leurs freins.

Vrai qu’en général, toute réduction de vitesse est suivie d’une accélération. Et on le sait, rien n’est plus dommageable pour la consommation en carburant que les accélérations.

Vrai aussi que celui qui s’octroye une marge de manœuvre avec la circulation devant, pour ainsi éviter d’avoir à freiner puis à ré-accélérer, devrait ressentir les effets positifs de cette anticipation, tant sur l’économie en carburant que sur la durabilité de ses freins.

Mais de là à ne plus jamais actionner les freins de son véhicule, il y a une limite – une limite que les hyper-kilométriques n’hésitent cependant pas à franchir.

Pourtant, tout automobiliste le moindrement éclairé sait que de ne pas s’arrêter aux feux et aux intersections est non seulement illégal, mais que c’est d’une idiote témérité.

Une témérité qui risque de lui coûter la vie.

Comment, dites-moi, pourra-t-il raconter qu’il a réussi une fantastique moyenne de 3L/100km, s'il n'est plus de ce monde?!?