Début des années 1980, la commande était claire:
Volvo a demandé à ses ingénieurs de concocter une voiture qui puisse accueillir au moins deux passagers, qui pèse au max 700 kg (c’est une centaine de kilos de moins qu’une Smart fortwo, ça!) et qui consomme sous les 4L/100km.
Aujourd’hui, une telle tâche demande de substantiels efforts, alors imaginez il y a trois décennies…
Afin de réussir leur Volvo LCP 2000 (les trois lettres pour Light Component Project et le “2000” pour, évidemment, l’an 2000), les ingénieurs ont eu recours à l’aluminium, le magnésium et la fibre de carbone.
Ces matériaux allégés étaient si coûteux qu’ils n’étaient alors utilisés que pour les voitures de course. Même qu’on n’avait plus ou moins étudié l’utilisation extensive de magnésium.
Vrai qu’aujourd’hui, ces matériaux se sont démocratisés – mais notez qu’ils ne l’ont fait qu’au cours de la dernière décennie…
Retrouvé dans les archives…
Nous avons retrouvé dans les archives de la SAE (Society automotive engineering) un document technique rédigé par les ingénieurs de Volvo à la suite de leur expérience “LCP 2000” de 1983.
C’est fou, ce qu’on peut y apprendre:
- À l’époque, les Volvo de référence faisaient osciller la balance de 1250kg – soit presque deux fois plus qu’allait le faire le prototype Volvo LCP 2000.
- Alors que le poids des voitures était au deux tiers attribuable à l’utilisation de l’acier, celui du Volvo LCP 2000 avait pu être substantiellement réduit: l’acier ne représentait qu’un quart du poids total.
- Surtout, on avait fait appel au magnésium. Cinquante kilos de magnésium, pour être plus précis, ce qui représentait un étonnant 7% du poids total du véhicule-concept.
- Évidemment, on avait aussi eu recours à l’aluminium. Déjà, les voitures de l’époque incorporait ce matériau, mais le Volvo LCP 2000 en intégrait plus du double (avec 23%).
- Merci au hayon fabriqué de plastique renforcé, on avait même réussi à faire passer la proportion du plastique, pour le prototype, à un tiers de son poids total – soit trois fois plus que la norme de l’époque.
Tous ces efforts n’ont pas été vains: le Volvo LCP 2000 réussissait un très frugal 3,6L/100km, soutiennent les ingénieurs qui ont rédigé le rapport.
C’était là une consommation d’énergie 60% moins élevée que pour une voiture similaire du temps…
À l’huile de patate frites…
Sous le capot du Volvo LCP 2000, on retrouvait l’un ou l’autre des deux moteurs trois cylindres turbodiesel spécialement conçus par Volvo pour être légers – et économes en carburant.
D’où la boîte manuelle cinq rapport et… la transmission à variation continue (CVT). Entre vous et moi et la boîte à beurre, s’il est bien une percée technologique que nous aurions aimé ne pas devoir souffrir, c’est bien la CVT…
Le premier moteur (de 1,3 litre) conçu pour le Volvo LCP 2000 était fabriqué de magnésium et produisait à peine 50 chevaux. Le second (de 1,4 litre), cette fois fabriqué de fonte, développait 90 chevaux et promettait le 0-60m/h en 11 secondes.
Surtout, ce second organe se démarquait du premier en acceptant non seulement le diesel, mais également le bio-diesel.
Rappelez-vous: on est en 1983 et les carburants alternatifs ne sont même pas encore dans l’imaginaire.
Et voilà qu’un moteur peut rouler à l’huile de patate frites…
Viable, mais…
Alors que toutes les Volvo étaient des voitures à propulsion, la Volvo LCP 2000 était d’architecture à traction. (Notez qu’il faudra attendre 1991 pour qu’une première Volvo s’offre à traction – et c’était la Volvo 850).
L’éditeur du temps au magazine Popular Mechanics, Wade Hyot, avait d’ailleurs eu l’occasion de conduire le prototype et il avait décrété qu’il s’agissait là “d’une proposition viable”.
Mais il commentait cette tentative automobile d’en arriver à la plus faible consommation en carburant en disant ceci: “Qui s’en préoccupe? Puisque nous sommes en surabondance de pétrole et que les prix se sont stabilisés, peu d’acheteurs de voitures s’intéressent à l’économie, pour le moment.”
S’il est bien une prophétie qui ne s’est pas avérée, c’est bien celle-là…
Et parlant de prophétie: qui, à l’époque, aurait pu prédire qu’un jour, la suédoise Volvo serait propriété de la chinoise Geely?
D’accord: ça, c’est une autre histoire.
Aérodynamisme inégalé
Du Volvo LCP 2000, on retiendra, au-delà de sa fibre écologique, qu’on avait réussi à atteindre un haut niveau d’aérodynamisme, encore aujourd’hui peu égalé.
À 0,25cx, c’est là le coefficient d’une Toyota Prius de nouvelle génération.
De fait, le concept Volvo LCP 2000 était, aux années 1980, ce qu’est à notre décennie le prototype Volkswagen XL1:
- Une deux places hybride-diesel branchée – son deux cylindres turbodiesel de 0,8 litre développe 47 chevaux…;
- Un poids total de 795 kilos – c’est un peu plus lourd que le prototype vieux de 30 ans, mais équipements de sécurité obligent…;
- Comme pour le Volvo LCP 2000, l’acier utilisée dans la fabrication de la Volkswagen XL1 ne compte que pour un quart du poids total;
- Avec son aérodynamisme de 0,19cx, la Volkswagen XL1 est, pour le moment du moins, la voiture de production la plus aérodynamique qui soit.
Vous avez bien lu: de production.
Car à la différence du Volvo LCP 2000, qui n’a jamais connu les chaînes de montage, Volkswagen a annoncé la fabrication de sa XL1 et ce, pour la prochaine année.
En quantité limitée, bien sûr…