Consommation truquée chez Mitsubishi: on est loin du DieselGate de VW!

D’abord, les véhicules visés par l’admission de Mitsubishi, des mini kei cars aussi vendus par Nissan, sont dotés d’un moteur à essence – pas diesel, comme chez Volkswagen.

Surtout, il n’est pas ici question de logiciels de mise en échec (defeat devices) destinés à tromper les tests d’émissions polluantes en laboratoire, et installés illégalement pendant six ans (au minimum) dans des véhicules qui, sinon, n’auraient jamais obtenu leur certification environnementale nord-américaine.

Quand même: ce sont les tests eux-mêmes qui ont été truqués, dans le but d’obtenir sur papier une consommation en carburant plus frugale pour quatre modèles (voir plus bas), vendus sur le marché japonais depuis trois ans maintenant.

Mitsubishi parle lui-même de manipulations des équipements afin de réduire «la résistance de l’air et au roulement», ajoutant avoir de surcroît découvert que les tests qu’il mène depuis 2002 ne concordent pas avec la procédure exigée par les autorités japonaises.

Illégal au Japon, «flexibilités» en Europe…

Soit, mais jetez un oeil sur notre reportage de l’automne dernier, Volkswagen, 8 étonnantes révélations qui transformeront l’industrie, et voyez comment en Europe, la procédure NEDC autorise semblables «flexibilités» – des échappatoires, en bon français.

Écarter les étriers de freins, tester à des températures élevées, sur-gonfler les pneus, sceller les interstices à la carrosserie pour un meilleur aérodynamisme… la liste est longue. D’ailleurs, dans son rapport Don’t Breath Here publié tout juste avant que n’éclate Das Skandal, l’organisme Transport et Environnement estimait que ces «flexibilités» permettaient une réduction de 10% des émissions mesurées.

Quand même de la triche

Reste que la triche, c’est de la triche. Et vous direz – avec raison – que les véhicules qui consomment plus, eh bien ils polluent plus.

Mais la falsification admise aujourd’hui par Mitsubishi est plutôt de l’ordre des «erreurs» notées au début de la décennie chez Hyundai/Kia et pour les hybrides de Ford. Erreurs que les constructeurs coréens et américain ont dû payer très cher, d’ailleurs.

20 fois moins de voitures touchées – et juste au Japon

Autre différenciation entre le scandale TDI de l’automne et le dernier en lice: là où Volkswagen est toujours à revoir les systèmes de pollution pour certains de ses 11 millions de véhicules TDI visés, le nombre de véhicules concernés chez Mitsubishi est près de 20 fois moindre.

Qui plus est, ces 625 000 exemplaires (le tiers vendu par Mitsubishi – les eK Wagon et eK Space, les deux tiers vendus par Nissan – les Dayz et Dayz Roox) sont uniquement distribués au Japon, non pas à travers le monde.

Cela dit, le grand patron de Mitsubishi, Tetsuro Aikawa, ne devait pas être heureux d’avoir à présenter ses excuses et à s’incliner bien bas… dans sa propre contrée, réputée pour le savoir-faire automobile.

Afin de rassurer les autres marchés, M. Aikawa a par ailleurs affirmé que tous les autres véhicules vendus à l’international, testés (en théorie) selon les réglementations de là où ils sont distribués, passeront prochainement au crible.

Kei cars hier, Kei cars demain…

Si le DieselGate a frauduleusement impliqué des prétentions «diesel propre» ayant permis aux clients d’empocher des rabais gouvernementaux encourageant l’acquisition automobile «verte», chez Mitsubishi, rien de cette nature. Les modèles sont – et resteront des kei cars, en dépit d’une consommation de carburant accrue. Quand même, le constructeur ne pourra sans doute pas se soustraire aux dommages punitifs et compensations aux acheteurs.

NDLR: Les kei cars, un phénomène japonais qui date d’après la deuxième Grande guerre, sont une classe de véhicules d’au plus 3,4 mètres de long (la Mitsubishi Mirage en fait 3,8 mètres) et dont la puissance ne dépasse pas les 64 chevaux (un tiers moins que pour la smart fortwo). Conséquence: ces mini-véhicules sont jusqu’à 30% moins taxés par les autorités japonaises que les véhicules de catégories supérieures. Cela dit, cette réduction des taxes tient surtout compte de la cylindrée – que les Mitsubishi visées continuent de respecter avec leur motorisation sous les 660cc.

Une bien meilleure gestion «de l’affaire»

L’affaire Volkswagen a éclaté au grand jour en septembre dernier, soit… plus d’un an après que l’américaine Environmental Protection Agency (EPA) ait commencé à soupçonner un quelconque pot-aux-roses. On saura peut-être un jour depuis et jusqu’à quel point les dirigeants allemands de VW savaient, mais c’est là une autre histoire.

Dans le cas qui nous concerne aujourd’hui, c’est le partenaire Nissan, non pas une organisation de surveillance gouvernementale, qui a révélé les irrégularités: ses propres tests de consommation étaient de 5% à 10%, dit Bloomberg, plus élevés que les données fournies par Mitsubishi.

Mitsubishi a donc refait les tests et, devant les mêmes irrégularités, a enquêté. Puis, au lieu d’attendre que le ciel lui tombe sur la tête, il a convoqué une conférence de presse, au cours de laquelle il a déclaré sans faux-fuyant que les employés ayant agi de la sorte, l’avaient fait intentionnellement. Une enquête indépendante sera ordonnée, a ajouté M. Aikawa.

Un dernier point: si Volkswagen était – et est toujours le 2e constructeur en importance de la planète, Mitsubishi est un si petit joueur sur l’échiquier automobile qu’il ne figure pas même au palmarès des 10 plus grands constructeurs.

Saviez-vous que…

… c’est demain, 21 avril 2016, qu’expire le délai accordé à Volkswagen par les autorités américaines. C’est donc demain que le constructeur allemand devra présenter une solution pertinente (et acceptable aux yeux américains) quant au problème d’émissions de ses moteurs diesel, plus élevées que la norme autorisée (jusqu’à 40 fois). On surveille ça pour vous…