Non, l'essence n'est pas assez chère!

Dossiers
mercredi, 30 juin 2010
Vous avez bien lu: l’essence n’est pas assez chère. Et avec cette fuite de pétrole qu’on ne parvient toujours pas à colmater dans le Golfe du Mexique, il faudrait sérieusement se demander si on a encore le droit de rouler en gros utilitaire…

Bon, première mise au point: les utilitaires d’aujourd’hui consomment pas mal moins qu’il n’y a pas si longtemps et ils émettent moins de polluants que n’importe quelle vieille minoune mal entretenue. C’est un fait.

Mais reste que de quitter le concessionnaire automobile au volant d’un nouveau camion muni d’un puissant V8, et non pas à bord d’une petite voiture peu gourmande en carburant, ça vient faire pression tant sur l’environnement que sur la facture ramassée à la station service.

Alzheimer, quand tu nous tiens…

Avec les prix du carburant qui, depuis un temps, se maintiennent, il semble que les automobilistes aient oublié.

Il semble qu’ils aient oublié cette première fois en 2005 où – oh, crime de lèse-majesté – le prix du litre d’essence avait franchi le cap du dollar.

Et il semble aussi qu’ils aient oublié ces flambées dramatiques qui, il y a deux ans, ont fait friser le litre à près de 1,50$.

À l’époque, le choc à la pompe était si grand que cela avait influencé les ventes automobiles. On achetait beaucoup moins de camions, alors que les compactes et les sous-compactes avaient la cote comme jamais.

Mais depuis, c’est comme si l’on souffrait collectivement d’Alzheimer. On dit le passé garant de l’avenir, mais les automobilistes semblent faire exception : ils ne se souviennent plus qu’il y a tout juste une décennie, ils faisaient le plein de leur Honda Civic pour moins de 30$.

Soit deux fois moins qu’aujourd’hui…

Courbes parallèles

On ne s’en sort pas : lorsqu’on jette un œil à la courbe statistique des ventes de véhicules compacts au Canada, on note qu’elle monte et descend au diapason de la courbe des prix du carburant. Le coût de l’essence monte? Les petites voitures se vendent comme des p’tits pains chauds. Le coût de l’essence redescend – oh, juste un peu ? Les petits véhicules sont soudain moins populaires.

L’an dernier, la moitié de l’année s’est déroulée avec le litre d’essence sous le dollar. Une « bargain »! Et en cette première moitié de l’année 2010, on s’en tire avec une moyenne de 1,07$ le litre (à Montréal).

Résultat : les ventes de camions n’ont pas tardé à rebondir. Depuis le début de l’année, les Canadiens achètent davantage de camions (en hausse de 19%) versus la même période en 2009.
Malheureusement, ils achètent moins de voitures : une baisse de 1,4%, alors que le marché est pourtant en augmentation de 8,5%.

Les sous-compactes sont particulièrement affectées par une chute de 20%, alors que les utilitaires compacts brillent d’une hausse de 28%.

Pour renverser la tendance, il n’y a pas de doute : il faut que le carburant coûte davantage. Mais… gageons qu’après une année ou deux à un tel sommet à la pompe, les automobilistes vont s’être habitués.

Et l’on pourra sans doute écrire le même texte, avec la même manchette à l’appui… pendant qu’il y en aura encore pour se magasiner un utilitaire.


« Au bout du pétrole »

Faire le plein, une action vouée à la disparition vers 2050 parce que les stations service n’auront plus de carburant fossile à nous vendre? C’est ce qui nous attend si l’on ne réagit pas assez rapidement, soutient Normand Mousseau, professeur du département de physique à l’Université de Montréal.

M. Mousseau est l’auteur du livre « Au bout du pétrole – tout ce que vous devez savoir sur la crise énergétique », publié aux Éditions MultiMondes. Il prédit que le litre d’essence atteindra d’ici cinq ans, dans la métropole montréalaise, les 4$ ou 5$. Consolons-nous : les Français paient déjà l’équivalent de 1,76$ le litre et les Belges, 2,41$!

Pas surprenant que de l’autre côté de l’Atlantique, les automobilistes privilégient massivement les petites voitures. Et qu’une fois sur deux, ils optent pour une motorisation diesel, ce qui leur en donne au minimum 30% plus pour leur argent.


L’essence : Montréal parmi les villes canadiennes les plus « chèrantes »
Saviez-vous que de toutes les villes du pays, Montréal est l’une de celles qui demande le plus cher pour son carburant?

Un coup d’œil à l’Enquête hebdomadaire des prix au détail menée par la firme de Calgary MJ Ervin et Associés (www.mjervin.com) montre que notre belle métropole est en tête d’une quarantaine de villes canadiennes avec, en moyenne depuis le début de l’année, 1,07$ le litre d’essence (taxes comprises).

Seules Labrador City (1,20$), Yellowknife (1,18$), Gander (1,14$), Whitehorse (1,12$) et Vancouver (1,12$) sont plus gourmandes.

La moyenne nationale pour 2010 s’établit à 1,02$. C’est à Edmonton (0,91$) et à Calgary (0,92$) que l’on paie le moins.

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