Quand dire adieu à sa vieille « minoune »?

Trucs et astuces
vendredi, 15 octobre 2004
La clé tourne dans le contact, mais le moteur n’émet aucun son. Bon, encore une réparation automobile en perspective. Est-ce le démarreur? L’alternateur? Le moteur? En fait, la vraie question qu’il convient de se poser est: ne serait-il pas temps de se débarrasser de cette vieille « minoune » et de se procurer une toute nouvelle bagnole?

La question est simple, mais la réponse est loin de l’être. Il n’existe malheureusement aucune boule de cristal qui permette de trancher entre «acharnement mécanique» et «renouvellement prématuré».

Par contre, quelques grandes lignes peuvent être utilisées à titre d’indicateur. Voici lesquelles.

En faveur de la « minoune »

Elle n’est pas d’une première jeunesse et la rouille commence sérieusement à gruger sa robe autrefois rutilante, mais elle continue néanmoins de mener ses occupants à bon port. Alors, pourquoi lui dire adieu?

Après tout, elle coûte moins cher en assurances qu’une voiture neuve – jusqu’à trois fois moins si son propriétaire ne choisit que la responsabilité civile, populairement surnommée la couverture «d’un seul côté».

Qui plus est, elle n’est pas grevée de ces paiements mensuels qu’exigerait un véhicule neuf. Et un véhicule neuf, ça coûte cher. La firme torontoise Runzheimer International a voulu en faire la preuve : à l’été 2002, elle a étudié ce qu’il en coûte annuellement pour rouler une Ford Taurus neuve dans la région montréalaise.

Tout a été passé au crible : coût d’acquisition réparti sur quatre ans (après cette période, la voiture est revendue), essence, entretien, assurances et dépréciation. Résultat : la dépense représente au bas mot 11 000$ par an!

Ce qui fait le plus mal? La dépréciation. Selon Dennis Desrosiers, président de la firme canadienne Desrosiers Automotive Consultants, une voiture neuve perd la moitié de sa valeur à ses cinq premières années. Son propriétaire a donc tout avantage à amortir cette dépréciation sur le plus grand nombre d’années possibles.

Bien sûr, une voiture usagée coûte plus cher en entretien et en réparations qu’un véhicule neuf. Une étude réalisée par CAA en 2001 rapporte que les voitures âgées entre 6 et 10 ans demandent en moyenne un millier de dollars par année en réparations et en entretien (887$ pour les véhicules japonais, 1048$ pour les véhicules américains et 1228$ pour les véhicules européens).

Ce qui ne représente même pas les taxes (TPS et TVQ) exigées à l’achat d’une nouvelle automobile…

Oui, mais le « neuf »…

Conserver sa vieille voiture le plus longtemps possible présente certes son lot d’avantages, mais aussi d’inconvénients.

D’une part, la « minoune » est mécaniquement moins fiable qu’une voiture neuve et ne démarre pas toujours au quart de tour. « Dans certains cas, c’est le fait que le véhicule se retrouve toujours au garage qui incommode le propriétaire, plus que le montant des réparations, » dit Dennis DesRosiers.

D’autre part, les garanties du véhicule, synonymes de tranquillité d’esprit, ont expiré il y a belle lurette. Et bien sûr, la vieille voiture ne bénéficie pas de toutes ces avancées technologiques en matière de sécurité : freins ABS, coussins gonflables (obligatoires aux États-Unis dans tous les véhicules neufs depuis 1997), systèmes de stabilité et antipatinage, assistance au freinage d’urgence.

Ces dispositifs revêtent pourtant leur importance. Au dernier sondage du CAA mené auprès des propriétaires automobiles canadiens, 69% des répondants ont dit souhaiter que leur prochain véhicule soit équipé de freins ABS.

Également à placer dans la balance : les faibles taux de financement et les substantiels rabais actuellement offerts par les constructeurs automobiles. Les mesures incitatives à l’achat n’ont jamais connu un tel sommet et elles permettent aux consommateurs de sauver plusieurs centaines, voire plusieurs milliers de dollars additionnels.

On serait fou de ne pas en profiter…

Autre excuse pour aller vers la nouveauté : les besoins ont peut-être changé au fil des années. La camionnette qui tracte le bateau est-elle toujours nécessaire, maintenant que le bateau a été vendu au beau-frère? Et la fourgonnette est-elle toujours indispensable, maintenant que les enfants ont quitté le nid familial?

Les nouveaux véhicules ont aussi le mérite d’être moins gourmands en carburant que leurs prédécesseurs. Ainsi, la Honda Accord dotée d’un moteur V6 de 3,0 litres réclame 1889 litres d’essence par année, alors que la même voiture d’année-modèle 1995, équipée d’un moteur V6 de 2,7 litres, en réclamait 2167 litres (estimations annuelles EnerGuide, basées sur une distance annuelle de 20 000 km, 55% en ville et 45% sur autoroute).

C’est 15% de moins, malgré une cylindrée plus grande, soit une économie de 236$ (à 0,85$ le litre d’essence).

Enfin, l’espérance de vie des véhicules a doublé. Dennis Desrosiers rapporte que si ceux fabriqués dans les années ’70 roulaient en moyenne 150 000 kilomètres avant d’expier, ceux d’aujourd’hui atteignent facilement le double, soit les 300 000 kilomètres.

Attention à l’acharnement mécanique

Les arguments apportés précédemment font pencher la balance en faveur de la vieille voiture? Attention cependant de ne pas succomber à l’acharnement mécanique. « Il faut s’avoir s’arrêter, dit Bruno Provencher, responsable du Centre de vérification technique CAA de Montréal. Réparer un véhicule le remet en ordre de marche, mais ne le rajeunit pas. »

Le chroniqueur automobile Benoît Charrette ajoute : « Peu importe ce que vous investissez dans votre vieille voiture, vous n’en tirez pas plus. Et de toute façon, il va bien falloir vous en départir, un jour ou l’autre… »

Surtout, il devient difficile de planifier ce qui lâchera, quand et à quelle fréquence. Pour en avoir le cœur net, rien de mieux qu’une visite chez le garagiste afin de dresser un bilan de l’état de santé du véhicule.

Peut-être sera-t-il alors découvert que la structure n’est plus bonne à rien ou que les réparations à prévoir sont plus importantes que prévu. En auquel cas, mieux vaut ne pas débourser davantage que le prix que rapporterait la voiture si elle était revendue.

Ce prix de revente peut être établi en consultant les guides vendus en kiosque, mais aussi en inspectant les petites annonces des journaux.


Selon les experts que nous avons interrogés, trois grands signes doivent irrémédiablement sonner l’alarme et inciter le propriétaire à faire ses adieux à sa vieille voiture : le moteur qui flanche, la transmission qui cède ou la carrosserie qui se transforme en fromage de gruyère.

En effet, un moteur qui rend l’âme signifie généralement d’autres tout aussi sérieuses réparations à venir, par exemple à la transmission – et vice-versa. Voilà l’indice d’une dégradation avancée et qu’on le veuille ou non, l’usure poursuit son travail.

Autre signe du temps : la carrosserie qui s’éraille et, sous elle, le châssis qui se décompose. Faire repeindre la première n’augmente pas la valeur du véhicule; tout au plus celui-ci se vendra-t-il plus rapidement, mais la dépense est inutile et superflue.

Pire : « Si le châssis est complètement fini, dit Bruno Provencher, toute réparation sera comme d’installer une belle dentition neuve à une personne âgée atteinte de cancer en phase terminale. »

« C’est comme une réaction en chaîne, conclut Benoit Charrette. Une première grosse réparation en entraîne généralement une autre. Ne faites pas de votre véhicule un puits sans fond et reconnaissez qu’il a fait son temps. »

Bref, mieux vaut ne pas trop attendre. Surtout si la « minoune » a encore ne serait-ce qu’une infime valeur; la somme récupérée à sa revente pourra constituer un capital servant à l’achat d’un autre véhicule.

La clé du succès : s’informer auprès du plus grand nombre possible de sources afin d’en venir à une décision éclairée. Non seulement garagistes, études sur la fiabilité des véhicules et sur le coût des pièces peuvent vous assister, mais vos parents et amis, forts de leurs expériences ‘automobiles’ personnelles, peuvent grandement vous venir en aide.

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