Le régulateur: où, comment, pourquoi... et pourquoi pas?

Trucs et astuces
jeudi, 15 mars 2007
Croyez-le ou non, l’inventeur du régulateur de vitesse était un… aveugle. L’Américain Ralph R. Teetor, né en 1890, a perdu la vue à l’âge de cinq ans. Ça ne l’aura toutefois pas empêché de concevoir, dans les années ’40, un dispositif destiné à contrôler la vitesse.

N’eut été de son avocat, M. Teetor n’aurait jamais créé pareille technologie. Mais son homme de loi avait la fâcheuse tendance, derrière le volant, à ralentir lorsqu’il discourait, et à accélérer lorsqu’il écoutait…

Teetor a travaillé une dizaine d’années sur son « Speedostat », avant d’en obtenir le brevet en 1945. La première voiture à en être équipée? La Chrysler Imperial, année-modèle 1958. En 1960, toutes les Cadillac en étaient dotées.

Avant de se fixer définitivement sur « cruise control », le régulateur de vitesse a porté les désignations Controlmatic, Touchomatic ou encore Pressomatic. Mais presque 50 ans après sa première application automobile, sa fonction initiale n’a toujours pas changé : maintenir une vitesse de croisière constante.

« Voyons, où est le bouton »?

Parce qu’il se retrouve aujourd’hui dans la majorité des véhicules de tourisme, le régulateur de vitesse est un instrument de conduite que l’on prend trop souvent pour acquit. On l’engage sur l’autoroute lors de longs trajets, on le désactive lorsque la circulation se fait plus dense. Sans plus.

Pourtant, malgré son fonctionnement automatique, le dispositif demande à ce qu’on lui prête attention.

D’abord, il faut s’en familiariser avant de prendre la route. À 100km/h sur l’autoroute, ce n’est vraiment pas le moment de se pencher au-dessus du volant, à la recherche de la commande qui met le dispositif en garde-à-vous.

Il convient aussi repérer la commande « set », qui fera en sorte que le véhicule maintienne sa vitesse de croisière. Par la suite, chaque petite touche sur cette même commande entraînera une légère accélération, à raison d’un mille à l’heure (1,6 km/h).

N’oublions pas la commande « coast », qui joue le rôle contraire, celui de la décélération. Ni le bouton « resume» qui somme le véhicule de revenir à la dernière vitesse enregistrée avant que le régulateur ne soit momentanément désengagé.

Enfin, la commande « off » désactive le système – une telle manœuvre peut également être ordonnée par simple pression de la pédale de frein ou, dans le cas des automobiles équipées d’une boîte de transmission manuelle, de la pédale d’embrayage.

Rester alerte

Le régulateur est certes en mesure de maintenir la vitesse d’un véhicule, mais il n’a aucun pouvoir sur la vigilance du conducteur.

Et c’est là que réside le danger : « Il est si facile de baisser sa garde lorsqu’on n’a pas à contrôler la vitesse, dit Raynald Côté, agent de recherche chez CAA-Québec. Pourtant, il continue de s’en passer, des choses autour de nous. Et il faut demeurer alerte; l’attention ne doit pas baisser, pas même d’un cran. »

De même, l’automobiliste doit conserver une position dynamique derrière le volant. La jambe droite, qui n’est plus sollicitée par la conduite, ne doit pas pour autant se retrouver repliée sous le siège, en mode repos.

Au contraire, même si le pied n’enfonce plus l’accélérateur, il doit être placé là où il devrait normalement l’être : à proximité du frein. « En cas d’urgence, l’on doit pouvoir retrouver ses points de repère de façon instantanée, pas se demander où est la pédale de freinage, » dit M. Côté.

Jamais sur chaussée glissante

Les manuels du propriétaire l’exhortent, noir sur blanc : ne jamais engager le régulateur de vitesse sur chaussée glissante, lorsque les conditions d’adhérence ne sont pas optimales.

Chaussée glissante ne signifie pas uniquement surface enneigée ou glacée; cela signifie aussi surface mouillée. Vous avez bien lu : mouillée. En effet, une simple pluie peut se traduire par des accumulations d’eau, donc par des risques d’aquaplanage.

Dans une telle situation, la réaction instinctive de tout conducteur est la bonne : lever le pied. Cependant, si le régulateur de vitesse est engagé, celui-ci voudra compenser pour les roues qui patinent et il commandera une très indésirable accélération. « En une fraction de seconde, prévient M. Côté, le conducteur peut perdre la maîtrise de son automobile et se retrouver dans le champ. »

Pas toujours de mise, le régulateur

Tous les experts le disent : en conservant une vitesse de croisière prédéterminée, le régulateur concède une certaine réduction de la consommation d’essence.

Mine de rien, le dispositif vient aussi en aide à tou(te)s ces automobilistes qui ont le syndrome du pied pesant. Vous êtes de ceux qui, lorsqu’ils appuient sur l’accélérateur, ne peuvent tolérer de rouler à moins de 130km/h? Le régulateur de vitesse, stabilisé à la limite légale, peut vous épargner quelques coûteuses contraventions.

C’est le cas, certes, sur les autoroutes et grandes routes en ligne droite, sans courbe prononcée.

En terrain montagneux toutefois, le dispositif n’est plus d’une grande utilité. Au contraire : « En commandant une vitesse constante, le régulateur fait que le moteur passe son temps à chercher ce qui n’est peut-être pas être le régime parfait, » dit M. Côté. On peut alors dire adieu au bénéfice « réduction de la consommation ».

Aussi : « La conduite sur des routes sinueuses demande un plus grand contrôle de la part de l’automobiliste, ne serait-ce que parce que la circulation s’y croise, dit encore M. Côté. Advenant une situation d’urgence, l’on doit pouvoir réagir rapidement, sans perdre de précieuses secondes à essayer de désengager le régulateur. »

Des régulateurs « intelligents »

Même sur les autoroutes, l’utilisation du régulateur doit être réfléchie. La circulation est dense? La manipulation des commandes au volant afin de ralentir, puis accélérer de nouveau, peut facilement déconcentrer le conducteur, alors que celui-ci doit plutôt canaliser son attention sur ce qui se passe tout autour.

Voilà pourquoi de plus en plus de constructeurs de marques de luxe proposent des régulateurs de vitesse dits « intelligents ». Jumelés à un radar anti-collision installé dans la calandre, ces dispositifs tiennent compte de la vitesse des véhicules qui précédent.

La circulation se fait plus lente? Ils ajustent automatiquement la vitesse, de façon à maintenir une distance sécuritaire et ce, sans même que le conducteur n’ait à intervenir.

Mercedes-Benz a été le premier constructeur à proposer un régulateur du genre, sur sa Classe S d’année-modèle 1999. D’autres marques ont suivi et l’an dernier, Audi est allé encore plus loin. Non seulement son utilitaire Q7 ralentit dans le flot d’une circulation moins fluide, mais il freine de lui-même à l’approche d’un bouchon et ce, jusqu’à immobilisation complète.

La file de véhicules se remet en branle? L’Audi fait de même, toujours sans l’intervention du conducteur.

Le système est ingénieux, mais plus que jamais, l’automobiliste doit demeurer vigilant. « Ces nouveaux régulateurs de vitesse fonctionnent bien, mais il ne faut pas mettre en veille totale notre responsabilité de conducteur pour autant, conclut M. Côté. Sinon, mieux vaut prendre le train ou l’autobus! »

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