Dormir dans vot'char? Ne cherchez pas le trouble...

Dossiers
mercredi, 11 décembre 2013
Le party a été arrosé et vous prévoyez un p'tit roupillon dans votre char, afin de cuver vos excès? Ce n'est pas une bonne idée. En moins de temps qu'il n'en faut pour crier «merde», vous pourriez vous retrouver avec une accusation au criminel.

On connaît tous les accusations au criminel pour conduite avec un taux d’alcoolémie dépassant la limite permise ou encore avec les facultés affaiblies* – par l’alcool, par les drogues ou même par les médicaments.

Ce que l’on connaît beaucoup moins, ce sont les accusations, également au criminel, de garde et de contrôle d’un véhicule avec les facultés affaiblies ou un taux d’alcoolémie dépassant la limite permise.

Garde et contrôle d’un véhicule, ça veut dire:

  • que vous démarriez le moteur ou pas;
  • que la clé soit dans votre poche ou… vous ne savez plus trop où;
  • que vous soyez assis au volant ou même derrière à la banquette…

Autrement dit, vous êtes saoul dans votre véhicule? Vous risquez le trouble.

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Aussi « pire » que si vous aviez conduit

Vous avez bien compris: même si vous ne conduisez pas votre véhicule, vous pourriez être accusé d’en avoir la garde ou le contrôle si vous vous y trouvez en état d’ébriété.

Et les répercussions seront alors absolument les mêmes que si vous aviez pris le volant – y compris la révocation du permis de conduire et, pour les récidivistes, des peines d’emprisonnement.

Surtout, ne pensez pas vous en tirer avec des excuses comme « J’attendais un taxi » ou « Je ne savais plus où étaient mes clés ».

Car la garde, c’est la garde.

Et tant pour le Code criminel (article 258) que pour le Code de la sécurité routière (article 5.1), vous êtes présumé avoir la garde ou le contrôle d’un véhicule dès que vous êtes assis à la place du conducteur.

Qu’importe si vous y est éveillé… ou profondément endormi.

Vous voulez vous suicider, judiciairement parlant? Glissez la clé dans le contact…

Cette maudite clé, vous ne savez plus où vous l’avez mise? Encore là, ce n’est pas une excuse.

Un client de l’avocate criminaliste Me Véronique Robert l’a appris à ses dépends; il s’est fait pincer alors qu’il dormait à poing fermé sur le siège du conducteur. Il a eu beau affirmer qu’il ne savait pas où se trouvait son trousseau de clés, il a quand même été condamné.

Les clés… se trouvaient dans le siège du bébé, installé à l’arrière.

Ne pensez même pas à la banquette…

Vous vous dites que roupiller sur la banquette arrière, ça ne peut faire de mal à personne?

Mauvaise nouvelle pour vous: la cour prendra pour acquis qu’à tout moment, vous pourriez changer d’avis.

N’oubliez pas: vous avez les facultés affaiblies, donc on ne peut prévoir comment vous allez réagir. En moins de deux, vous pourriez passer sur le siège devant, glisser la clé dans le contact et mettre la voiture en mouvement.

Et vous transformer en un danger ambulant.

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Il vous faudra faire la preuve…

La loi est non seulement très sévère en la matière, elle est l’une des rares en droit criminel où l’accusé porte le fardeau de la preuve.

Ça s’appelle renverser la présomption et c’est donc à la personne, trouvée en état d’ébriété à bord de son véhicule, de faire la preuve qu’elle ne s’y trouvait pas dans le but de mettre le véhicule en mouvement.

De un, ce n’est pas tâche facile.

Et de deux: encore faut-il que le juge croit la chose…

L’exception…

Un homme a réussi.

Rappelons cette histoire: en février 2009, Donald Boudreault, du Saguenay, avait pris place, saoul, sur le siège conducteur de sa camionnette.

Le moteur tournait, question de réchauffer l’habitacle, mais ce n’était qu’en attendant son raccompagnement. M. Boudreault avait effectivement planifié de ne pas conduire ce soir-là et l’appel de service avait déjà été logé.

Il a été acquitté par le juge… pour ensuite voir la Cour d’appel du Québec casser cette décision. Il a choisi de porter sa cause en Cour suprême, où il a gagné son point: le plus haut tribunal du pays l’a cru, quand il disait avoir un plan réel pour rentrer chez lui sans conduire.

Mais du même souffle, le jugement a souligné qu’après avoir appelé un taxi, une personne en état d’ébriété peut toujours changer d’avis et prendre le volant…

« C’est l’affaire de quelques secondes, que de démarrer son véhicule et de se retrouver dans une situation bouleversant sa vie et celle des autres »

- Mario Vaillancourt, porte-parole de la Société de l’assurance automobile du Québec

Ne prenez donc pas de risque…

Alors, pourquoi prendre le risque?

Pourquoi s’attirer des ennuis – judiciaires ou autres – quand il suffit de planifier son retour, avec un service de raccompagnement (justement, quel hasard, c’est l’époque de Nez Rouge…), un taxi ou un chauffeur désigné?

Le message de prudence est fort simple: tenez-vous loin de votre véhicule lorsque votre capacité de conduire est affaiblie.

Besoin d’un moment de repos ou d’un coin pour attendre le taxi?

Envisagez un autre scénario que de dormir dans votre char.

Ou, comme le recommande Hubert Sacy, directeur général d’Educ’Alcool, ne dépassez pas les limites: « Vous êtes alors certain de ne pas courir de risque… »

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* La loi prévoit des sanctions pour quiconque est trouvé coupable de conduite (ou de garde ou contrôle d’un véhicule) avec les facultés affaiblies OU de conduite avec un taux d’alcoolémie dépassant la limite permise.

Les deux accusations diffèrent en ce sens que quelqu’un qui conduit avec un taux d’alcoolémie sous la limite légale peut quand même être inculpé pour conduite avec facultés affaiblies, que ce soit par l’alcool, la drogue ou encore les médicaments.

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