Ah, si j'étais un moteur AMG...

Dossiers
mardi, 14 novembre 2006
Affalterbach, Allemagne – Si j’avais à me réincarner, je choisirais de revenir sur terre… en moteur Mercedes AMG. C’est fou, l'attention et le bichonnage personnalisé auxquels j’aurais alors droit!

Il fait un temps superbe, sur la campagne allemande. Nous sommes à Affalterbach, petit village situé à une vingtaine de kilomètres à vol d’oiseau de Stuttgart. Presque au milieu de nulle part, surgissent des buildings modernes qui, mine de rien, recèlent le rêve de tout amoureux(se) de la performance.

En effet, c’est là que sont conçus, développés et assemblés suspensions, freins, transmissions et autres composantes Mercedes-AGM. C’est là, surtout, que sont usinés les moteurs AMG, ceux-là même qui produisent jusqu’à 612HP, pour un 0-100km/h en 4,2 secondes…

Le monastère de la performance

Dans une vaste salle agréablement par la lumière du jour, une trentaine d’employés s’affairent autour de chariots où trônent fièrement des V8 AMG.

Selon la philosophie « Un homme, un moteur », chaque technicien, hautement qualifié, est responsable de l’assemblage complet de la mécanique. Et ce, du positionnement du vilebrequin dans le bloc-moteur au tout premier remplissage d’huile. Au total, près de 500 composantes passeront entre leurs mains expertes.

Nous les observons déambuler d’un poste de travail à l’autre, poussant leur illustre chariot avec concentration, comme s’ils véhiculaient le plus important des patients. C’est à peine s’ils lèvent les yeux vers le groupe de visiteurs que nous sommes, trop occupés qu’ils sont à consulter l’ordinateur fixé à leur kart d’assemblage.

Celui-ci, relié au réseau par une connexion sans fil, leur transmet en direct la progression du travail en cours.
Avec son plancher immaculé et son ambiance presque religieuse, l’endroit aurait indéniablement eu quelque chose de monastique, sans ces dizaines d’outils qui pendent du plafond, au bout de leur rallonge. Les bruits sont négligeables, et l’on a peine à croire qu’il se fabrique ici, annuellement, près de 20 000 moteurs – un maximum quotidien de deux par homme.

4,5 heures pour un V12

Un expert AMG met environ 3,5 heures à produire un V8 – comptez une heure supplémentaire pour un V12, qui s’assemble à l’étage supérieur. N’opèrent là qu’une douzaine de techniciens, dans une atmosphère encore plus clinique qu’au premier niveau.

Une fois l’assemblage terminé, le virtuose de la puissance doit être testé. Alors là, seulement là, le technicien pourra y apposer la célèbre plaque portant sa signature personnelle. On nous assure que moins de 1% des moteurs AMG ne réussissent l’ultime épreuve…

Il n’y a pas si longtemps, les véhicules destinés à une carrière « AMG » quittaient leurs chaînes de montage respectives pour Affalterbach, en vue d’un assemblage final. « Mais d’un point de vue qualité, dit Thomas Rappel, chef de la direction des produits AMG, la meilleure façon de procéder était de n’assembler le véhicule qu’une seule fois. »

Voilà pourquoi aujourd’hui, les V8 et V12 sont expédiés aux diverses usines Mercedes. L’intégration «AMG» s’effectue donc à Tuscaloosa, en Alabama, pour les Classe M, R et GL; à Graz en Autriche, pour le Classe G; à Sindelfingen en Allemagne, pour les Classe E, CL, CLS et S. Et à Bremen, toujours en sol germanique, pour les Classe C, SLK, CLK et SL.

Mais encore et toujours, le cœur et l’âme de l’AMG sont façonnés à Affalterbach, à même le berceau de ce qui peut être considéré comme l’héritage allemand de la performance automobile.
 

Questions-réponses avec M. Rappel (!)

Mercedes AMG : Non à la boîte manuelle, mais peut-être oui la traction intégrale…

Affalterbach, Allemagne – Thomas Rappel (!) ne porte décidemment pas le bon nom de famille pour œuvrer dans l’industrie automobile. Qu’importe, il est le chef de la direction des produits pour AMG. Nous avons pu discuter à bâtons rompus avec lui : de traction intégrale, de moteurs diesel et de boîtes manuelles. Qu’en est-il de l’avenir AMG?

Q : M. Rappel, aurons-nous droit un jour à des AMG à traction intégrale?
R : Nous sommes bien au fait que notre 4Matic est de plus en plus populaire. Voilà qui nous place devant une phase stratégique pour notre avenir : une AMG 4Matic? Nous ne disons pas non, définitivement pas non. Même que nous en discutons. Techniquement, la chose est possible. Et côté image, nous n’y voyons pas de problème : l’aspect sécurité est aussi bien accepté, aujourd’hui.

Mais qui dit traction intégrale, dit aussi poids ajouté à la voiture. Et augmentation des coûts, ainsi que hausse de la consommation en carburant. Il nous faut également voir ce qui se perd au niveau de la conduite, à quelle vitesse le véhicule pourra prendre un virage, ce qu’il pourra faire en autocross. La discussion fait son chemin et nous saurons trouver les bonnes réponses.

Q : Avec le succès du moteur diesel d’Audi aux 24heures LeMans, est-ce que AMG envisage une telle motorisation?
R : Nous avons nous-même eu notre propre histoire « diesel », avec la C30 AMG à moteur diesel cinq cylindres (NDLR : lancée en 2003, en exclusivité pour le marché européen). Néanmoins, nous n’envisageons pas une telle motorisation – le V6 diesel de Mercedes fait actuellement du très bon boulot. Évidemment, nous avons sondé le marché, mais celui-ci nous dit que la demande pour une version AMG diesel n’est pas très forte.

Q : Est-ce que la Classe B aura un jour sa version AMG?
R : Non, ni la Classe A, d’ailleurs. D’abord, ce sont des véhicules à traction. Nous nous sommes demandés si, en leur ajoutant de la puissance, nous pourrions être compétitifs, par exemple contre la Volks GTi, mais nos ingénieurs ont dit : non. Alors, nous n’irons pas dans ce segment.

Il faut aussi se demander jusqu’à quel point l’on peut étaler la marque. Vous avez, tout en haut, la S65 AMG qui demande plus ou moins 250 000$ canadiens. Comment pouvons-nous nous montrer digne de confiance si nous arrivons, au bas de l’échelle, avec une Classe A AMG? Non, nous n’irons jamais en deça de la Classe C. Quant à une possible C63 AMG? Nous en sommes encore à investiguer la chose, aucune décision n’a été prise.

Q : Qui dit performance, dit généralement transmission manuelle. Pourquoi pas chez AMG?
R : Certes, BMW propose la transmission manuelle, et c’est ce qui fait sa différence. Chez AMG, nous parlons évidemment ‘performance’, mais nous souhaitons celle-ci combinée à un usage pratique et quotidien. Bien sûr, nous avons longuement discuté de la chose – je vous avouerai même que nous avons eu beaucoup de requêtes, spécialement de l’Amérique du Nord. Nous avons néanmoins décidé de nous en tenir à la boîte automatique. Nous considérons que notre SpeedShift, avec ses commandes au volant et ses trois différents programmes (confort, manuel et sport), sait répondre à tous les types de conduite.

Q : Quels sont vos modèles AMG les plus populaires?
R : Le plus grand « hit » de notre histoire est la SL 55 AMG. L’an dernier, ce fut cependant la CLS 55 AMG et cette année, notre meilleur vendeur est… notre utilitaire ML 63 AMG. Si nous en sommes vexés? Allez donc poser la même question à Porsche, avec son Cayenne…

Q : Est-ce qu’il y a une limite à la course aux chevaux-vapeur? Par exemple, échafaudez-vous une AMG de 800HP?
R : Techniquement, nous pourrions faire grimper nos performances assez facilement, par exemple avec un quad-turbo. Prenez par exemple la Bugatti Veyron... Mais une question doit être posée : quelle portion de cette puissance, sur une voiture à propulsion pure, peut être acheminée à la route? Qu’est-ce qui est réellement utile? Nous pensons que 500 chevaux, voire 612 chevaux avec la S63 AMG, sont de bons chiffres qui nous permettent de demeurer compétitifs.

Au Canada, une Mercedes vendue sur dix est de facture AMG.
Le plus grand marché pour la filiale allemande de performance se trouve… de l’autre côté de l’Atlantique, aux États-Unis.



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