Toyota Prius: ça coûte cher, être vert!

Comparos
mardi, 21 décembre 2010
La 3e génération de Toyota Prius a beau avoir gagné en complexité depuis son arrivée sur le marché il y a dix ans, reste qu’on peut la conduire comme n’importe quelle autre voiture.

Certes, il faut apprivoiser son démarrage sans clé et quelques-uns de ses gizmos qui semblent tirés tout droit du futur, mais elle se laisse sagement apprivoiser.

Quand même : est-ce que ça vaut la peine de verser 28 000$ pour une hybride avec, pour objectif, la réduction de sa consommation en carburant? Nos essayeurs du mois sont d’avis que ça coûte encore trop cher, la tranquillité de sa conscience environnementale.

Le principe de cette chronique ‘Yin et Yang automobile’ est fort simple : nous prêtons un véhicule de presse à un couple qui, pendant deux semaines, en fait extensivement l’essai. Les deux participants ont une consigne à respecter : noter toutes leurs impressions, bonnes ou mauvaises, grandes ou petites, intelligentes ou nigaudes. De fait, comme on vous le dirait à la petite école : ça n’existe pas, une impression nigaude.

Ces «j’aime» et «je n’aime pas», chaque essayeur doit les garder pour lui-même, question de ne pas dénaturer l’expérience de l’autre. Pas facile, nous dit-on… Nous recueillons le tout en fin de test routier et nous vous livrons la chose de but en blanc, à chaud.

Pas de censure, que la «vraie patente», vue par des gens qui, comme vous, ne conduisent une nouvelle voiture qu’à tous les 4-5 ans – quand ce n’est pas au 7-8 ans.

Notre essai ci-dessous porte sur la Toyota Prius, cette hybride à hayon de 3e génération dont l’échelle de prix varie entre 27 800$ et 37 400$. C’est la version de base, sans panneaux solaires, sans sièges de cuir chauffants et sans système de stationnement automatisé, que nous avons prêtée à Emiko Mikawa et Marc Legros, de Saint-Colomban dans les Laurentides.

Voici ce qu’ils en ont dit.

YIN

Nom : Emiko Mikawa

Âge : 39 ans

Résidence : Saint-Colomban, Laurentides

Métier : agente de comptes à recevoir

Conduit au quotidien : Mazda MPV 2000

Emiko Mikawa est accoutumée aux grands véhicules, elle qui conduit une fourgonnette où peuvent prendre place équipements de sport, poussettes et quoi encore. Surprise : la Toyota Prius, qui lui semblait être un petit véhicule, s’est révélée pas mal plus logeable qu’escompté :

«L’espace disponible m’a étonné, autant pour les passagers que pour le rangement. D’habitude, une petite voiture quatre portes dispose d’un coffre plutôt restreint, surtout en hauteur, mais avec son ‘hatchback’, la Prius s’avère très pratique.»

Au départ, notre essayeuse du mois s’est inquiétée de l’étrangeté ‘hybride’ : «La Prius n’est pas comme toutes les autres voitures dans lesquelles on entre, on insère la clé, on tourne et ça démarre. Il a fallu m’habituer à démarrer sans clé, mais au bout de deux jours, j’étais à l’aise.»

Trop complexe

Emiko a de bons mots pour l’allure extérieure du véhicule, de même que pour le design de son tableau de bord. Toutefois, elle ne se dit pas fervente de la multiplication des commandes et des écrans d’affichage : «C’est beaucoup trop compliqué. Le chauffage ne devrait être qu’une roulette facile à ajuster, alors qu’on a plutôt affaire à des fonctions divisées. Conséquence : j’ai passé ma semaine d’essai à chercher ce qui faisait quoi. Lorsqu’on conduit, on n’a pourtant pas le temps de regarder à ça!»

Notre essayeuse admet qu’elle aurait aimé avoir plus de temps afin de découvrir le fonctionnement du système hybride. « Au fur et à mesure, j’ai compris que la batterie se recharge par le freinage, mais j’aurais aimé en savoir plus. Par exemple, quelqu’un qui fait beaucoup d’autoroute, donc qui ne freine pas souvent, aura-t-il suffisamment de charge?»

Conduite zen

Une fois le principe «hybride» en partie assimilé, Emiko a apprécié le silence qui règne à bord lorsque la motorisation à essence n’est pas en action. «C’est vraiment particulier, comme impression. C’est apaisant, c’est même zen et j’ai bien aimé. Par contre, je me suis parfois demandé si la voiture était en marche ou pas. Je me suis alors dit que quelqu’un qui n’est pas attentif pourrait avoir des problèmes, voire causer un accident.»

Côté puissance : «C’est moyen. Ce n’est pas faible, mais ce n’est pas fort non plus.» Sur le plan du confort, pas un mot à redire : «J’étais bien assise». Par contre, Emiko a pesté contre les sièges trop bas : «Dans ma fourgonnette, je dépose Yoan (deux ans et demi) dans son siège, alors que dans la Prius, je dois me pencher et c’est très difficile pour le dos.»

Vision arrière entravée

Enfin, notre essayeuse a reproché à la lunette arrière d’être traversée par la coupe du hayon : «Ça dérange vraiment la vision, il y a toujours quelque chose derrière qui nous empêche de bien voir.» Si elle devait investir plus ou moins 30 000$ dans un véhicule, est-ce qu’elle se procurerait l’hybride de Toyota? « Non, je reluquerais plutôt du côté d’un utilitaire…»

YANG

Nom : Marc Legros

Âge : 38 ans

Résidence : Saint-Colomban, Laurentides

Métier : photographe

Conduit au quotidien : Volvo V70 2000

Depuis toujours, Marc Legros conduit des Volvo familiales. « Pas des neuves, toujours des usagées, mais elles sont toujours bien équipées, notamment de sièges en cuir chauffants. » Ce fidèle à la marque suédoise a donc d’emblée trouvé que la Toyota Prius ne profitait pas des sièges les plus confortables en ville : « Les baquets sont raides, le support lombaire est rigide… J’avais l’impression d’être dans une voiture de 12 000$, pas de 28 000$. Et uniquement pour cette raison, je ne l’aurais pas achetée, la Toyota Prius.»

Par contre, et à l’instar de sa conjointe, Marc a trouvé plus d’espace à bord qu’anticipé : «L’habitacle est spacieux, les enfants ont de la place, le coffre a pris son lot de chargement – encore plus lorsque une fois la banquette rabattue. Si j’avais à faire avec cette voiture, je survivrais et je ne serais pas malheureux, du moins côté espace.» Et c’est un grand de 6,1 pieds qui dit ça…

Difficile baptême «hybride»

Dès les premiers instants, notre essayeur a eu son baptême ‘hybride’ qu’il n’est pas prêt d’oublier : «J’ai appuyé sur le bouton de démarrage et… rien. J’ai éteint, j’ai appuyé de nouveau… toujours rien. J’ai cherché le manuel du proprio, j’ai réessayé encore, je suis sorti de la voiture pour voir si la télécommande était détectée, j’ai ré-embarqué… toujours rien. Au bout de cinq minutes, en désespoir de cause, j’ai passé le levier à la position ‘R’ et – oh surprise! – la Prius s’est mise à reculer! J’ai alors réalisé qu’une fois les batteries à pleine charge, le moteur à essence ne contribue pas et on peut alors rouler tout en silence, comme dans un kart de golf. Et c’est surprenant : il est tellement rare qu’on soit en mouvement… sans bruit!»

Ce silence lui fait cependant craindre les accidents dans les quartiers résidentiels ou dans les stationnements : «Quand tu roules ‘zéro bruit’ et qu’il n’y a que les pneus qui crissent sur la route, tu peux quasiment devenir un danger public.»

Question d’habitude

Tout au long de son essai d’une semaine, Marc a dû s’habituer. D’abord, s’habituer à une instrumentation au centre de la planche de bord : « Même si ça fait 25 ans que je conduis avec les cadrans, les lumières et les aiguilles devant moi, je me suis rapidement habitué à regarder plus à droite pour trouver l’info et ce n’est pas dérangeant.»

Il a aussi dû s’habituer au levier de vitesse, petit gizmo qui semble tiré du futur, de même qu’aux (trop?) nombreuses commandes : «Au début, on se cherche, notamment pour régler la radio ou l’intensité du chauffage, mais c’est finalement bien fait. » Enfin, Marc a dû s’habituer à la vision arrière handicapée par la ligne du hayon.

On se fout des graphiques

Celui qui passe son temps à tripoter des appareils-photos plus sophistiqués les uns que les autres n’a pas mis trop de temps à comprendre comment passer d’un graphique de consommation à un autre. «J’ai analysé tout ça la première journée, j’ai compris le principe de la batterie et de son autonomie, le fait que le freinage soit productif et à quel moment le moteur à essence embarque… Bref, j’ai compris ce qu’était une hybride. Et je suis convaincu que les gens qui achètent une Prius trouvent fort intéressant de voir ce qu’ils consomment en carburant ou comment faire pour épargner un litre de plus. Mais pour ma part, j’ai plutôt laissé l’écran au schéma des roues qui tournent… parce que c’est celui-là que mon garçon Noa préférait. C’est vous dire que dans la vie de tous les jours, je m’en fous, de ces diagrammes-là.»

Puissance correcte… mais équation peu profitable

Par ailleurs, Marc l’avoue : il n’est pas du genre à appuyer indument sur le champignon. «Je roule à 100km/h sur l’autoroute et il est très rare que je dépasse quatre véhicules en ligne, bref je ne cherche pas la puissance. La Toyota Prius m’est donc apparue très correcte, côté performances et je considère qu’elle propose une puissance proportionnelle à sa catégorie.»

Par contre, il n’a pas fallu longtemps avant que notre essayeur peste contre ce pont qui sépare le conducteur du passager : «Lorsque j’engage le régulateur de vitesse et que je veux ‘m’évacher’ un brin, ce petit muret restreint mes mouvements d’un bord, et la portière les restreint de l’autre. C’est peu confortable et je me demande : est-ce vraiment bien nécessaire, ce pont à la ‘cockpit’ de pilotage?»

Parlant de ce qui est nécessaire: Marc a calculé que, dans son cas, un véhicule hybride ne serait guère profitable. «J’ai fait plus ou moins 700 kilomètres avec un plein de 40$, alors qu’en temps normal, une telle distance me coûte 65$. C’est dire une différence d’environ 1300$ par année en carburant – et au passage, je m’interroge sur les performances du système électrique en hiver… Est-ce que cette économie d’essence justifie le coût plus élevé d’un véhicule hybride? Mon constat est qu’actuellement, il faut être riche ou diablement écologique pour répondre oui à cette question.»

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